Le milieu journalistique haïtien traverse une nouvelle zone de turbulence après que des menaces de mort visant le journaliste Ronald Desormes ont circulé publiquement. Le co-animateur du Journal Premye Okazyon, diffusé sur Caraïbes FM, serait directement ciblé par des propos attribués à Jimmy Chérizier, alias « Barbecue », figure centrale de la coalition armée Viv Ansanm.
Selon plusieurs sources relayées sur les réseaux sociaux, Chérizier aurait promis une somme de 50 000 dollars américains à quiconque exécuterait le journaliste et fournirait la preuve de l’acte. Cette annonce, d’une violence frontale, marque un nouveau palier dans les pressions exercées contre les professionnels des médias en Haïti.
La réaction n’a pas tardé. L’organisation SOS Journalistes, qui suit depuis des années la recrudescence des attaques contre la presse, a dénoncé ce nouvel épisode dans une note ferme, évoquant une « dérive criminelle » nourrie par une impunité persistante. Elle appelle les autorités étatiques et la Police nationale à prendre immédiatement les mesures nécessaires pour protéger Ronald Desormes.
Au sein de Radio Télévision Caraïbes, cette affaire résonne avec un passé récent déjà lourd : les journalistes Johnny Ferdinand et Dieuseul Guerrier avaient eux aussi été menacés, leurs noms circulant dans des messages d’intimidation lancés par des groupes armés. D’autres rédactions du pays rapportent des pressions similaires, attestant d’un environnement de travail devenu précaire, parfois dangereux.
Les accusations dirigées contre Chérizier sont particulièrement troublantes. Les propos qui lui sont imputés appellent ouvertement au meurtre d’un journaliste dont la fonction première est de relayer des faits, d’interroger l’actualité et de rendre compte des réalités du pays. Cette logique d’élimination physique vise non seulement une personne, mais aussi le rôle même de la presse dans une société démocratique.
Pour SOS Journalistes, l’enjeu dépasse le cas individuel : chaque attaque alimente la peur, réduit l’espace de liberté et met en péril la capacité du public à recevoir une information indépendante. Le secrétaire général Guy C. Delva rappelle que l’État a l’obligation de garantir la sécurité de ceux qui exercent cette mission essentielle.
Dans un pays déjà secoué par une violence endémique, ces menaces réaffirment un constat alarmant : informer peut désormais coûter la vie, et la protection des journalistes devient une urgence nationale.
